Compétences

- la principale des compétences de Rival reste buter des gens à coup d'épée. A une main, à deux mains, il s'en fout, il sait faire.
- il parle vadran et camorrien couramment, ayant appris la seconde langue par sa mère, bien qu'il conserve un fond d'accent du nord lorsqu'il parle en thérin moderne
-il sait lire, écrire et compter, puisqu'il a bénéficié d'une éducation classique de la petite noblesse vadrane
- c'est un bon professeur, et son sens de la pédagogie est apprécié de ses élèves
- il a un don pour le commandement et la stratégie, ce qui est du à sa formation de soldat.
- originaire d'Emberlain, canton tourné vers la mer, il a des connaissances assez poussées en matière de navigation, comme tout bon vadran avec une formation militaire qui se respecte. Cependant, ce n'est certainement pas sa spécialité.

Le maitre d'Armes

Une chanson siffle dans l'air ; elle ramène Rival Wintherthur des années en arrière, en un temps où tout était facile et où toutes les possibilités lui étaient ouvertes.

"Si tu voyages dans le beau pays du nord,
Où les vents soufflent fort à la frontière,
Rappelle-moi à quelqu'un qui vit là.
Elle fut jadis mon véritable amour..."

Cela faisait des années qu'il était né, oui, si loin de Camorr. Fils de Biarni Wintherthur, un Porteur de Nom doté de plus d'honneur que de richesse - ayant perdu la majorité de sa fortune dans des bâteaux qui partirent mais n'atteignirent jamais de ports - et de l'honorable Lorna Mantovani, dont le père, le vieux don Erri, trouverait la mort lors de la Guerre des Mille Jours, Rival hérita d'un prénom aux consonnances thérines et d'un caractère naviguant étrangement entre les deux nationalités de ses deux parents. Enfant sérieux dans les études, tout comme son frère Mordecai, il ne tarda pas cependant à se révéler plus frondeur, moins enclin à l'argumentation posée qu'à utiliser une lame, une masse, ou n'importe quoi permettant de mettre un terme à la discussion s'il ne pouvait gagner par la raison. Il formait cependant un bon duo avec son frère, plus posé - mais aussi plus rigide, plus froid, plus honorable. Non que Rival soit dépourvu d'honneur, mais il sembla vite résolu à ne suivre qu'une série de règles : les siennes. Ainsi, s'il s'attachait à quelqu'un, il se décidait à le servir toute sa vie, peu importe son opinion. Il n'était pas dépourvu d'ambition non plus. Il observa rapidement les succès et les échecs de son père, et songea très vite que la carrière militaire lui conviendrait mieux.

Doté d'un certain charisme, Rival comprit cependant très vite que sur ce terrain, il n'égalerait pas son frère. Aimé, respecté, tout le monde tombait rapidement sous les charme de Mordecai, tandis que lui, plus sombre, malgré une certaine forme d'humour, plus froid, plus enclin à la colère, ne serait jamais suivi que par ceux qui prendraient le temps de s'intéresser à lui. Qu'à cela ne tienne, tant pis : Rival prouva bien vite qu'il était un bon combattant, un bon soldat, et s'imposa comme son frère dans la garde du graf d'Emberlain. Une vraie réussite pour leurs parents, qui virent ainsi la réussite de leurs deux fils assurée.

Pendant quelques années, les frères Wintherthur ne firent parler d'eux qu'en bien. Rival épousa Birgit Heilbrunner ; ce fut un mariage à la mode vadrane, ce qui lui coûta cher par la suite, mais à cette époque, il ne pouvait s'en douter. D'ailleurs, dans un premier temps, il ne fit guère d'écarts. Birgit ne lui avait été imposée par personne, elle était simplement la femme de sa vie. Rival l'avait toujours connue, elle venait comme lui de la petite noblesse d'Emberlain, et ils ne tardèrent pas à avoir des enfants. A vingt-trois ans, doté d'une bonne situation dans la garde du graf d'Emberlain, Rival était donc père d'une petite fille de quatre ans, Lotte, et d'un petit garçon d'un ans, Bert.

Ambitieux aussi bien pour lui même que pour sa famille, dont il voulait montrer la grandeur, n'hésitant pas à faire quelques passes d'armes en guise de démonstration et à prendre toute insulte comme prétexte à un duel,  il fut remarqué par le graf d'Emberlain, qui le nomma comme apprenti auprès de son son maitre d'armes personnel en 518, à vingt-cinq Ce fut un honneur pour Rival. Il jura sincèrement sur son honneur qu'il servirait toujours le graf. Et il pensait le faire, et l'aurait fait s'il n'avait pas rencontré le second amour de sa vie.

Ce même amour qui causa sa perte.

Elle s'appelait Cordelia Hase. C'était la fille d'un armateur réputé d'Emberlain, et pour cause ! Il participait à la Table Noire. Cordelia était jolie, attirante, séductrice. Rival eut l'impression qu'elle le comprenait mieux que personne, et ne vit jamais qu'elle se servait de lui. Il crut qu'elle était honnête lorsqu'elle lui parlait, et il voulait le meilleur pour elle - sans jamais abandonner sa femme, d'ailleurs, un soutien sans faille malgré le fait qu'elle eut eu plusieurs amants. A vingt-sept ans, quand il la rencontra, il croyait sincèrement que Cordelia était dans son camp, il ne cessa de lui faire confiance qu'une fois qu'il fut trop tard.

Au commencement, tout semblait aller pour le mieux. Wintherthur parvenait à entretenir sa femme et sa maîtresse. Il était bien vu parmi les Ancestraux et Porteurs de Noms. Il bénéficiait d'une excellente situation, qui s'améliora encore en 525. Cette année là en effet, le graf nomma Rival son maître d'armes personnel. Le vieux Hjaldur Jhering, son mentor, mourrut en effet cette année là, paisiblement et dans son sommeil. Le faste de la vie ainsi que la réussite de Rival Wintherthur continuèrent, mais peu de temps.

Ainsi, une fois de plus, la chose étant courante, les grands bourgeois de la Table Noire pensaient renverser le graf, avec l'aide d'un outil manipulable et bien placé auprès de lui...qui d'autre que ce jeune homme naïf et talentueux ? Il suffisait à Cordelia de rendre fou d'amour Rival. De prétendre avoir entendu son père comploter avec certains conseillers du graf...et de convaincre Wintherthur que la seule solution serait de les éliminer, pour ensuite reconstituer un nouveau conseil après avoir averti le graf. Bien sur, Rival serait récompensé pour cela. Naïf et ambitieux, le maître d'arme suivit le plan de sa bien aimée. En 528, Il assassina trois hommes qu'il croisait pourtant tous les jours dans le palais, avec qui il s'entendait, avant que le bruit ne commence à le désigner comme coupable, lui et son amante. Cordelia suggéra alors que le graf lui-même était corrompu, et qu'il était la prochaine cible à abattre. Déchiré, mais convaincu que Dvorim l'avait trahi, Rival, ivre de vengeance, décida de mettre le plan à exécution. C'était un quitte ou double pour Cordelia Hase : elle dénonça Wintherthur au graf. S'il échouait, elle serait dédouannée de tout le complot, et si son amant réussissait, et bien tout le monde oublierait ce détail.

Bien sûr, Rival échoua. Il parvint à prendre la fuite, mais il était trop tard pour le reste des Wintherthur. Lorsqu'il voulut emmener avec lui sa famille, il trouva tous les Wintherthur morts, à l'exception de Mordecai. Son frère aîné avait pris du galon, etdirigeait la garde du graf. Il fut envoyé par celui-ci en représailles. Condamné à mort, Rival n'eut d'autre choix que de fuir...

Jugeant qu'à Camorr, il pourrait recommencer une nouvelle vie, se basant sur la fortune des Mantovani et sur leur nom, il débarqua dans la cité-état plein d'espoirs...et déchanta, eh bien, rapidement.

L'ombre dans Camorr

En arrivant à Camorr à la fin de l'année 528, Rival pensait y être accueilli sinon comme un roi, du moins comme le cousin d'une bonne famille. Mais il trouva le palais des Mantovani à l'abandon. Le vieux don Erri, son oncle, avait perdu la vie lors de la bataille de Nessek. Quant à son fils, Gianlucca, il appris qu'il s'était suicidé - qu'on l'avait suicidé, ne tardèrent pas à lui murmurer certains - à cause de dettes contractées auprès de bien mauvaises personnes. Pauvre comme le plus pauvre des disciples de Perelandro, ayant dépensé ce qui lui restait de fortune pour payer son passage jusqu'à Camorr, l'ancien maître d'armes, ne connaissant guère la ville où il n'avait mis qu'une fois les pieds, se retrouva clairement à errer sans but dans une cité où il n'avait pas d'alliés, et ou potentiellement, il n'avait plus aucun parent.

Il disparut pendant près d'un an, devenant peu à peu une loque à force de boire, se fondant dans le paysage. Et finalement, si quelqu'un pouvait se rappeler qu'un maître d'armes vadran avait un jour débarqué à Camorr, personne ne faisait plus le rapprochement avec ce loqueteux mal rasé qui trainait dans les bars sans plan précis, gagnant au jeu les bons jours et se battant les mauvais. Personnage improbable, indifférent aux camps qui se nouaient, il tenta de reprendre quelques fois des activités plus honnêtes et finit à deux ou trois reprises garde du corps. Cependant, dès qu'il prononçait son nom ou qu'il buvait un peu trop, Rival se faisait impitoyablement renvoyer par ses employeurs. Il retournait donc périodiquement errer dans les bas fonds de Camorr, sans projets réels et sans but.

Que pouvait-il faire ? Il ne manquait pas d'audace, ni de talent, et ce malgré son penchant pour la boisson. Il avait espéré regagner une respectabilité à Camorr, mais personne ne semblait décider à ne la lui donner. Plus le temps passait, plus ce constat plongeait Wintherthur dans une révolte profonde. Qu'à cela ne tienne, si on ne voulait pas qu'il mène une vie honnête, il ne ménerait pas une vie honnête, mais il ne cesserait pas d'être ambitieux. Ce qu'on lui refusait, il le prendrait. Par la force, s'il le fallait. Armé d'un tel état d'esprit, Rival cessa peu à peu de boire, il se resaissit et devint peu à peu un genre de mercenaire. Seul, cependant, il ne pouvait survivre, malgré un talent de tous les diables à l'épée.

Ainsi, les Gens Bien voulant régulièrement sa peau, peu importe leur camp (souvent celui des gens qu'il assassinait, donc des ennemis de ses clients), Rival finit finalement par se faire un nom. Un nom qui parvint jusqu'aux oreilles d'un des capas de la bande des Démons, le Magnifique, qui recruta finalement Wintherthur et lui donna le surnom de Fléau. Vadran en exil entouré d'autres vadrans en exil, spécialiste des exécutions sanglantes - et de la mise en scène macabre - le Fléau n'a depuis cessé de se produire pour le compte du Magnifique, grâce à qui il gagne grassement sa vie, et a pu réaliser son ambition première : redevenir maitre d'armes.

Rival Wintherthur est réapparu d'un coup parmi la bourgeoisie, riche, aisé, installé à son compte et enseignant l'escrime à des bourgeois voulant jouer aux soldats. Il s'est acheté une respectabilité à coup de couteau, mais personne n'irait, après tout, regarder si le sang coule sous une cuirasse d'or. Et personne n'irait s'imaginer que derrière ce vadran calme, affable et pédagogue, se cache l'un des assassins décidé à faire le ménage dans les Gens Bien de Camorr pour celui qui pourrait en devenir le maitre.

Barsavi, ce drôle d'oiseau. Rival s'autorisa un sourire, remit son chapeau, et posa deux solons sur le comptoir. Il était temps d'y aller.